groupe Fusion en décembre 2006

 

A l’occasion de la sortie du cd “Christmas Blessings” du groupe Fusion, nous avons interviewé son cornemuseux Gustave Bruyndonckx. Enregistré en février dernier en deux jours seulement, ce cd de 20 chants de Noël traditionnels est le premier du groupe en dix ans d’existence. Dix ans qui l’ont vu passer d’un maximum de 27 musiciens à 8 actuellement. C’était bien sûr l’occasion de poser quelques questions …

Marc Bauduin.

Q : peux-tu expliquer comment et pourquoi vous êtes passés de 27 à 8 musiciens ? C’est un gros changement, et le nombre élevé de musiciens rendait Fusion très caractéristique, voire exceptionnel.

R : C’est une longue histoire ! La très belle chapelle de Stalle à Uccle (13ème siècle) venait d’être restaurée et le président du Cercle d’Histoire avait exprimé le souhait que des concerts y soient donnés. L’idée m’est venue de proposer à des amis du groupe « Roue Libre » et de l’académie de musique d’organiser ensemble un concert de Noël, chacun se chargeant d’une partie du programme avec son style de répertoire et ses colorations propres (chant choral, musique ancienne, chants populaires tchèques, …)

Ce fut une heureuse expérience. Comme il fut décidé de reconduire celle-ci l’année suivante, les plus enthousiastes recrutèrent à leur tour des amis musiciens pour participer à l’aventure.

Il était très enrichissant de se frotter à d’autres musiciens et à d’autres genres. Très facile aussi car chaque sous-groupe assurait lui-même sa partie du programme. Oliver Gray coordonnait le tout, entouré d’une petite équipe composée de Sophie Wagner, Annette De Winter, Catherine D et moi-même. Le groupe était à géométrie variable, en fonction des concerts. Nous étions très heureux de faire sonner ensemble plusieurs cornemuses, une demi-douzaine de vielles, une harpe, une viole de gambe , des violons, violoncelles et autres flûtes. Mais plus nous étions nombreux, plus nous devions limiter le temps de prestation de chacun. Et gérer tous les agendas des répétitions devenait de plus en plus difficile. Alors, nous avons fait le choix de garder une taille raisonnable.

Nous nous retrouvons depuis plusieurs années avec un groupe fixe, bien rodé. Il compte 8 membres : Catherine D (chant), Annette De Winter (harpe celtique) , Sophie Wagner (flûte traversière et accordéon), Nancy Boodts (violoncelle), Marc Vrebos (vielle à roue), Marco Somers (guitare et violoncelle), Oliver Gray (violon, alto, guitare et chant) qui assure la direction musicale, et moi-même (musette baroque et cornemuse).

Je voudrais profiter de l’occasion pour saluer amicalement tous ceux qui ont participé à l’aventure de ce groupe qui n’a reçu de nom que très tardivement :

Jacqueline et Walter Lenders, Céline Rochus, Patrick Dourcy, Christine Lurquin, Bruno Vermeulen, Ruprecht Niepold et sa classe de vielle (Johan Kayaert, Catherine Deprez, Stéphane Colin, Peter De Jonghe, Thierry Hercod, Pierre Mignot, Koen Van Daele), Anne de Bardzki, Anne Aertssen, René Moreau, Pascal Lallemand, Giorgio Rendace, Paul Colinet, Diane et Paul Gray, Lissa Nierhoff et Rafael Daun (du Cornemuse Consort Coelln à Cologne), Jean-Pierre Wilmotte , Michel Massinon, Alain Vanden Bemden, Pavel Haza, Claudia Bindelli, Christine Verheye, l’ensemble vocal PEJ …

Cette liste de noms d’amis m’impressionne. Elle explique aussi l’origine du nom FUSION.

Q : A part les Noëls, quel est votre répertoire ? Jouez-vous parfois pour la danse ?

R : Chaque année nous renouvelons une partie de notre répertoire car nous aimons emprunter de nouveaux chemins et intéresser notre public. Nous constatons que nous sommes loin d’avoir défriché une part satisfaisante de noëls traditionnels d’Europe. Ce répertoire est très vaste et nous n’avons que l’embarras du choix. Nous avons aussi expérimenté d’autres formules thématiques comme la St Valentin ou la période des moissons. Nous travaillons aussi un programme estival qui évolue d’année en année. C’est lui que nous avons présenté cet été à Mélin pour le Festival des Jardins (et fête de la musique), ainsi qu’au Brussels Royal Yacht Club. Ce programme comporte principalement des musiques de Belgique, de France, d’Irlande et du Royaume-Uni ainsi que des compositions propres. Nous devrions aussi orienter nos recherches vers l’Europe du Sud et de l’Est voire la Scandinavie. Notre répertoire comporte évidemment des danses telles que bourrées, valses, etc. mais dans des arrangements « à écouter » et non pour des bals folk. Les Flamands appellent cela du « luisterfolk». On ne peut pas vouloir à la fois interpréter des ballades irlandaises et être des as en animation de bals.

Q : Est-ce exact que vos concerts sont surtout des actions caritatives ? Quel est votre public, en général ?

R : Nous ne vivons pas de notre musique. Au début, nous nous interrogions sur la destination à donner aux petits bénéfices réalisés avec nos concerts et nous nous mettions d’accord pour en faire bénéficier l’une ou l’autre ONG. Nous avons adopté le principe de jouer une fois par an dans une prison (nous avons été à Mons, à Nivelles et plusieurs fois à Forest/Berkendael). Le 8 décembre prochain nous jouerons pour le mouvement ATD Quart Monde. L’église St Antoine permet d’accueillir 400 personnes ! Lorsqu’une association humanitaire ou caritative nous sollicite, je soumets le projet aux amis du groupe.

Q : Peux-tu décrire comment ça se passe lorsque vous jouez dans une prison ?

R : Chaque prison a son style et ses problèmes. Les formalités à l’entrée sont relativement longues. Souvent un seul véhicule est admis dans la cour de la prison avec tous les instruments à bord. Si ce n’est le cas, chaque instrument est soumis aux rayons X et au contrôle manuel. En général, chacun laisse sa carte d’identité à l’entrée en échange d’un badge.

En principe, il n’est pas permis de faire d’entracte ou de converser avec les prisonnier(e)s mais si tout se passe bien, nous sommes autorisés à nous mêler à la population carcérale qui nous questionne fréquemment sur les instruments.

Nous n’oublierons jamais notre visite à la prison de Mons où plusieurs détenus pleuraient pendant le concert. L’un d’entre eux a eu la possibilité de nous dire en quelques secondes qu’il avait vécu des moments de bonheur. A notre départ, certains nous ont crié depuis les cellules « Revenez ». Quelques jours plus tard nous avons reçu 3 lettres de remerciements et nous avons envoyé un enregistrement à leurs auteurs.
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Q : Y a-t-il eu des difficultés pour réaliser ce cd enregistré en février ?

R : Certains prétendent que réaliser un cd est pire qu’un accouchement. Mais quel bonheur quand bébé est là !

Il est important d’être bien au point pour ne pas faire durer les temps d’enregistrement. Une fois cet enregistrement réalisé, c’est le travail du « mixeur ». Mais alors commence le travail de composition du livret, de design du boîtier, … Il y a énormément de choses à penser et à vérifier dans les moindres détails. Tout cela est important parce que nous considérons que design et CD devaient former ensemble un objet d’art (beau et sans prétention). Nous pensons être rôdés pour un nouveau CD dans un an ou deux.

Q : Après Noël 2007, quels sont vos projets ?

R : Nous avons quelques projets pour 2008. Nous voudrions sortir davantage de Bruxelles et peut-être tenter une expérience en région flamande. Nous venons de donner un concert pour l’association « Femmes d’Europe » (section suédoise). Le 12 janvier, ce sera à l’auditorium de l’abbaye de Forest. Rendez-vous dans 10 ans !

 

Contact : groupefusion@hotmail.com, www.myspace.com/fusionbelgium.

 

(interview publié dans le Canard Folk en novembre 2007)