Aujourd’hui nous posons dès l’abord à Remy Dubois le problème du jeu. Ce que André Deru nous disait naguère est confirmé. Les joueurs d’épinette en Belgique ne dépassent généralement pas la petite moyenne alors qu’il y a de bons accordéoneux et de bons cornemuseux.

Ce qui manque, c’est une « locomotive »,comme J.Albert Baudour autrefois à Angre. Du coup on verrait les exigences des musiciens s’améliorer. La France possède Dutertre et autour ou face à lui sont apparus des musiciens de qualité dont J.L. Baly, Chr. Toussaint et quelques autres dont récemment J.Leininger. »

En fait en Belgique on joue toujours de façon rudimentaire: bâtonnet et technique du va-et-vient. Le répertoire reste souvent passéiste: les airs des quelques collecteurs belges dont on craint de sortir.

Or ce répertoire ne fut jamais celui de l’épinette: on jouait des mélodies populaires à la mode, telle que la Valse brune. Soyons donc audacieux, fabriquons des épinettes chromatiques double touche, multiplions les bourdons pour obtenir plusieurs accords comme les Roumains, utilisons une technique à la Dutertre.

« Recréons un répertoire en s’inspirant sans doute moins des quelques grands collectages belges que de la musique modale médiévale et des bases certaines de la ontredanse. Il s’agit de refaire un travail comparable à celui que Marc Malempré tente pour la danse actuellement en Belgique. »

La rencontre internationale de l’épinette à Fougerolles, qui devrait d’ailleurs se refaire cette année, a montré que cette attitude était non seulement possible mais fructueuse. Le jeu de l’épinette a un bel avenir devant lui.

Nous demandons alors à Remy Dubois quels sont ses secrets de construction. « Il n’y a pas de recette: les paramètres sont nombreux: épaisseur du bois, densité, formes, barrages et âmes possibles, longueur et épaisseur des cordes, recherche ,des harmoniques basses ou aigües.

Personnellement j’ai surtout construit des épinettes ventrues sous les bourdons afin de pouvoir multiplier ceux-ci: je refuse de me poser le faux problème culturel de savoir si je respecte une tradition.

Par contre, je suis sûr que, au-delà de l’information sur la technique, le « métier » est important. On finit par sentir comment le bois va vibrer. De ce Fait, il est intéressant de se limiter en lutherie.

Nous devinons que nos lecteurs attendent désormais que nous prenions rendez-vous pour eux avec Noël Warnier qui a repris le flambeau

Guy et Micheline Vanden Bemden-Casier

(paru dans le Canard Folk d’avril 1985)