Cette rubrique Farfouille Musicale se veut ouverte, de bric et de broc, à tout fouineur amoureux de la tradition musicale, chantée et dansée de nos régions.

Comme autant de loupiotes allumées aux fêtes et kermesses, comme autant de brandons réchauffant les veillées, puissent ces traces de nos ménétriers nous éclairer sur notre patrimoine musical populaire.

Ce patrimoine qui, fatigué de dormir dans les musées, se veut accessible à tous, et en constante évolution pour une pratique contemporaine.

Extrait de la notice de M.Marchal, instituteur communal à STEINBACH. (1877) *

« Une kermesse au 18e siècle »

« La musique de fête se composait ordinairement d’un violon, d’une clarinette et d’une contre-basse. C’étaient les mestret (ménétriers). Le samedi soir, musique en tête, la jeunesse faisait le tour du village, s’arrêtant devant chaque maison où il y avait une ou des demoiselles. Les mestret y jouaient les ombâdes (aubades).

On entrait pour boire une bouteille de pequet (genièvre), manger un morceau de doreïe (tarte), et danser. Le dimanche, nos artistes accompagnaient la messe, et M.le curé ne manquait jamais de leur donner un pour-boire.

A la sortie des vêpres, les jeunes hommes s’emparaient des demoiselles, et le bal commençait sur la prairie. C’était d’abord les danses du curé : le maître jeune homme les criait. M. le curé prenait la main d’une notable et faisait un carré. Il se retirait ensuite en recommandant la paix et le respect de l’étranger.

Suivaient les danses du maïeur et successivement celles des villages voisins. Les étrangers présents prenaient part aux danses de leur endroit. Le bal durait jusqu’à 11 heures, minuit. Le lundi on continuait sur le même ton.

Quant aux réjouissances du mardi, elles différaient. Un des plus joyeux s’habillait à la diable et se munissait d’une hotte ou d’un panier. Jeunes hommes et gamins le suivaient par tout le village : musique, bal, chansons, tohu bohu. Les dons en nature que le vêcheu recevait, étaient remis à quelque pauvre du village. Ces scènes sont encore en honneur dans bon nombre de localités en Ardennes. C’est ce qu’on appelle chasser le vêcheu.

Le bal régulier reprenait vers le soir et la journée se terminait par un repas payé en nature par les jeunes filles. Celles-ci apportaient des tartes, celles-là des gâteaux, d’autres du café, d’autres enfin du sucre. Le dimanche suivant était encore un jour de réjouissance : c’était les r’zaïe, usage conservé.

Que dansait-on ? La maclotte, la charbonnière, le menuet, les papiers blancs, l’amoureuse en face, l’amoureuse de Bastogne. Donner la chorégraphie de ces danses, je ne le puis, pour bien des raisons : je me contente de transcrire la musique d’une maclotte*, danse qui n’est encore qu’en désuétude, tandis que les autres ont disparu, du moins à Steinbach et dans les environs. »

Jacqueline et Walter LENDERS

* Sur cette musique, on danse aujourd’hui dans les bals folk, une contredanse en rond

* Emile TANDEL, Les Communes luxembourgeoises, Arlon 1891 Réédition: Culture et Civilisations, Bruxelles 1980, tome IV, pages 492-493

(paru dans le Canard Folk de juin 2000)